Un âne chez soi – quelques conseils pratiques

Dossier

Originaire des régions désertiques et semi-désertiques, l’âne y a développé des caractéristiques anatomiques et éthologiques qu’il a conservées malgré sa domestication. Voici les spécificités qui le distinguent du cheval/poney et qu’il vous faudra prendre en compte afin de satisfaire au mieux ses besoins et de le garder en bonne santé.

© N. Genoux / IFCE

 

L’âne, sa singularité tu connaîtras

En raison de la rareté en ressources alimentaires et en eau dans son habitat d’origine, l’âne vivant à l’état naturel passe la majeure partie de son temps à rechercher de la nourriture (14 à 18h/24h) et se montre peu sélectif. Rustique, il est ainsi capable de parcourir de longues distances quotidiennes, supportant également la rareté des ressources en eau. Au fil de son évolution, il a donc développé des caractéristiques anatomiques et éthologiques spécifiques, en lien avec ces conditions de vie.

© C. Losfeld / IFCE

L’âne, à ne pas trop le nourrir tu veilleras

L’efficience énergétique de l’âne est supérieure de 30% à celle du cheval. Ses besoins alimentaires sont ainsi nettement inférieurs, même à ceux du poney ! C’est d’autant plus vrai pour les ânes de petit gabarit…

Son appareil digestif est adapté à la valorisation d’aliments fibreux (herbes dures et broussailles) en fonction des ressources disponibles. Ainsi, dans la majeure partie des cas, le pâturage et/ou le foin couvrent largement ses besoins en énergie et en protéines. Si sa nourriture est trop riche, l’âne peut être sujet à des maladies métaboliques (fourbure). Pour prévenir les risques, limiter la taille des parcelles allouées aux moments où l’herbe est très riche (printemps) ou le faire passer après rasage par d’autres herbivores. Lorsque la ressource en herbe vient à manquer et qu’un apport en fourrage est nécessaire, privilégier un foin récolté tardivement / de la paille (moins riches en éléments nutritifs qu’un foin récolté précocement).

Pour satisfaire ses besoins nutritifs plus élevés qu’un âne à l’entretien, l’âne en croissance et/ou au travail pourra être légèrement supplémenté. Un fourrage de bonne qualité, récolté à un stade précoce, sera suffisant.

[Attention] Éviter absolument les aliments destinés aux chevaux qui sont beaucoup trop riches pour lui !

Les besoins en minéraux et vitamines peuvent être déduits des apports recommandés pour les chevaux et poneys. Un complément minéral vitaminé pourra être nécessaire pour les animaux exclusivement nourris avec des fourrages secs. Pour ceux ayant un accès quotidien à l’herbe, ces besoins sont couverts.

Les besoins en chlorure de sodium (NaCl, c’est-à-dire le sel) doivent être pris en compte, notamment en conditions chaudes et pour les ânes qui travaillent (et donc transpirent). Une pierre à sel classique avec accès à volonté suffit largement, l’âne régulera de lui-même sa consommation.

Le besoin en eau varie de 35 à 75g/kg de poids vif, selon l’activité, les conditions climatiques et la nature du régime alimentaire. Il est assez exigeant sur la qualité de l’eau. Attention à lui laisser un accès à de l’eau propre en permanence.

L’âne, son comportement alimentaire tu connaîtras

© J. Sarris / IFCE

L’âne doit pouvoir passer plusieurs heures par jour à se nourrir, au risque de développer des pathologies digestives (ulcères…) ou comportementales (stéréotypes liées à l’ennui…).

Les ânes sont des rongeurs de bois. Les branches et ligneux peuvent faire partie de leur régime alimentaire (saule, bouleau, noisetier, frêne, tremble…). Cependant, ne pas leur distribuer de déchets verts (résidus de tonte / taille de haies) et ne pas les laisser accéder aux clôtures en bois potentiellement toxiques (comme c’est le cas pour les poteaux en robinier faux-acacia par exemple).

L’âne, son état d’embonpoint tu surveilleras

Le suivi alimentaire de l’âne peut se faire par le biais de l’évaluation régulière de son état d’embonpoint, en lui attribuant une note d’état corporel (NEC). L’évaluation de la NEC d’un âne diffère de celle d’un cheval par des zones d’évaluation et de palpation différentes, la graisse se déposant préférentiellement au niveau de la nuque, puis des côtes.

L’obésité, qui est le risque majeur chez l’âne, est associée à un risque important de fourbure. Il est donc important d’ajuster sa ration rapidement en fonction de sa NEC. Comme pour les transitions alimentaires, la conduite d’un régime sur un animal obèse doit se faire de façon progressive, en limitant les quantités et non le nombre de repas et en introduisant progressivement plus d’exercice physique.

L’âne, de sa vie sociale, tu prendras soin

© L. Gérard / IFCE

Les ânes ont une organisation sociale différente de celle des chevaux, avec des groupes instables, de composition et de taille variées, entretenant des liens sociaux relativement lâches. Ce sont toutefois des animaux grégaires, qui forment facilement des paires, et entretiennent des liens privilégiés avec leur compagnon.

[Attention] En présence d’ânesses en chaleurs, les mâles reproducteurs peuvent se montrer particulièrement agressifs vis-à-vis des autres mâles et des ânes castrés. Pendant la saison de reproduction, il faut donc être particulièrement vigilant quant à la conduite du troupeau et si besoin séparer les ânes reproducteurs des autres individus pour éviter d’éventuels conflits.

Les groupes seront donc idéalement constitués soit d’hongres et ânesses, soit d’ânes entiers uniquement. Dans ce type de groupe, la distribution d’aliments peut être collective. Cependant, les ânes entretenant parfois des liens étroits avec un ou des compagnon(s) privilégié(s), veiller à ce qu’ils puissent être ensemble ou se voir pour manger (certains refusent de manger sans l’autre).

Les ânes cohabitent facilement avec d’autres espèces. Cependant, dans les troupeaux mixtes composés d’ânes et de mules, chevaux et/ou poneys, il faudra veiller à ce que les individus s’entendent bien entre eux, de façon à assurer un accès aux zones d’affouragement et d’abreuvement à tous et de prévenir tout risque de blessure lors d’éventuels conflits.

© Cheval Partenaire

L’âne, son besoin de se déplacer tu respecteras

À l’état naturel, l’âne est un animal rustique habitué à parcourir de longues distances au quotidien pour se nourrir. Il est recommandé de prévoir une surface minimale d’environ 5000 m² par âne à l’année, à adapter selon la région, pour lui permettre de se déplacer tout en s’alimentant.

L’âne, de sa santé tu prendras soin

Vaccination, vermifugation, maréchalerie… les soins courants et mesures sanitaires préventives s’appliquent aussi bien pour les ânes que pour les chevaux. Tout âne devrait normalement être à jour de ses vaccinations et suivi régulièrement par un maréchal-ferrant pour lui parer (voire lui ferrer) les pieds.

L’âne, l’humidité tu prendras garde

Certaines de ses particularités anatomiques participent à la régulation de la température corporelle de l’âne : grandes oreilles, longs poils peu gras… Sous nos latitudes, ces dernières le rendent sensible à l’humidité. Pensez à lui aménager un endroit propre et sec, à entretenir régulièrement, où il pourra s’abriter des intempéries.

L’âne a le pied sûr ! Ses petits sabots durs sont adaptés aux climats secs, aux sols caillouteux. Sur des sols meubles et a fortiori boueux dans un environnement humide, la surveillance des pieds sera donc de mise.

L’âne, à l’observer tu apprendras !

Prenez l’habitude d’observer vos ânes dans leur milieu de vie au quotidien, leur comportement, leur intégration dans le groupe, leur façon de se déplacer, de manger, de boire… Examinez régulièrement leur corps et leurs pieds. Contrôlez également chaque jour l’état de leur lieu de vie (points de rassemblement, clôtures, abris…). En mettant en place ces pratiques toutes simples (mais loin d’être anodines) au quotidien, vous apprendrez à les connaître, à repérer rapidement leurs comportements normaux et anormaux et à (ré)agir au plus vite si besoin !

Par L. Le Masne (IFCE)