12 octobre 2023 - Soins et Bien être

L’histoire de Nina, une jument maltraitée et sauvée

Dossier

A l’ère du bien être équin, la maltraitance animale est encore trop fréquente. Le monde équin se réveille et on assiste à de belles choses mais malheureusement trop de chevaux sont encore victimes de maltraitance.

La maltraitance, comment la définir ?

La maltraitance peut revêtir plusieurs aspects dont la violence physique, l’absence de soins, la négligence, le manque de nourriture et d’eau, une utilisation excessive et abusive du cheval, etc. Nos compagnons équins, pourtant robustes, peuvent être cruellement vulnérables face à aux comportements de maltraitance et à leurs auteurs.


Depuis l’instauration de la loi du 10 juillet 1976 visant à protéger la nature, un cadre rigoureux a été mis en place pour prévenir les mauvais traitements envers les animaux domestiques et ceux en captivité.

Pour mieux comprendre l’impact de la maltraitance sur les chevaux, retrouvons l’histoire de Nina.

Nina, son histoire


Cette jeune jument d’origine arabe à l’histoire bouleversante,  nous montre la résilience dont elle a dû fait preuve malgré l’horreur qu’elle a vécu. Nina a été maltraitée, très peu nourrie et soumise à de multiples tentatives de saillies dans un élevage au Maroc. 

Lors de ces tentatives de saillies, Nina qui était très jeune, a été entravée. Comme les tentatives de saillie n’ont abouties, l’élevage s’est débarrassé d’elle. Nina a été transportée en France vers un autre élevage où les mauvais traitements se sont poursuivis. Confrontée à une destinée tragique, cette petite jument a été sauvée de justesse d’une mort certaine.

Un sauvetage inespéré

À l’âge de trois ans, Nina porte déjà le fardeau d’une vie de douleurs. Son corps est meurtri, sa démarche entravée, et le simple contact humain lui est insupportable. Heureusement, le destin de Nina a pris un tournant décisif grâce à une personne au grand cœur qui a découvert son histoire. Récupérée de cet élevage, la petite jument a été libérée de son sombre destin et a pu entamer une nouvelle vie pleine d’espoir.

Le chemin vers la guérison

À son arrivée dans son nouveau foyer, Nina est une âme brisée, aussi bien physiquement que psychologiquement. Sa méfiance envers les humains est profonde et elle est incapable de se laisser approcher. Cependant, grâce à une approche patiente et bienveillante, les nouveaux propriétaires de Nina ont peu à peu gagné sa confiance. Ils ont veillé à lui offrir les soins nécessaires, une alimentation adéquate et beaucoup d’amour afin de favoriser sa guérison physique et émotionnelle.

« À son arrivée chez nous, Nina arborait une démarche hésitante, ses membres fins semblaient peser lourd lorsqu’elle avançait. Ses sabots étaient fragiles et maladroits sur le sol bétonné. Malgré ses peurs manifestes, elle semblait curieuse de tout ce qui l’entourait. Quand nous avons pris en charge Nina, son ancien gardien nous a expliqué qu’elle restait confinée dans son box depuis des mois, car lorsqu’elle sortait, il était souvent impossible de la récupérer. Un jour après son arrivée chez nous, nous avons décidé de la mettre dans un petit paddock en compagnie d’un cheval très calme. Le résultat a été saisissant ! Nous avons été émus jusqu’aux larmes en voyant cette petite jument rayonner de bonheur à l’idée de sortir et de se défouler aux côtés de son nouveau compagnon. Ses yeux brillaient, et bien que la ramener chaque jour du petit pré n’était pas simple, le fait de la voir libérer son trop-plein d’énergie constituait déjà une victoire », partage Stéphanie, sa propriétaire.

Les défis surmontés

Au fil des mois, Nina a fait d’énormes progrès. Sa santé s’est améliorée et elle a montré une incroyable résilience face à son passé douloureux. Grâce à une attention constante et à une approche adaptée, elle a commencé à reconstruire sa confiance en l’homme.

« Le simple fait d’approcher le box de Nina la remplissait d’effroi. Elle se réfugiait dans un coin, prête à escalader les parois si notre patience fléchissait. Il était impossible de lui mettre ou de lui enlever son licol. Pendant les premiers mois, nous avons utilisé une petite corde attachée à son licol. Cette astuce nous a facilité la tâche pour la sortir et la ramener au box. Sans l’extension de ce licol accompagnée d’un petit bonbon en récompense, il était très difficile de l’attraper », explique sa propriétaire.

« Je lui ai donné ses compléments alimentaires à la main, matin, midi et soir, dans l’espoir qu’elle associe la main de l’homme à autre chose qu’à des coups sur sa tête et son corps. À force de répétition, elle a progressivement perdu sa méfiance et nous a finalement acceptés. Il est important de noter que Nina n’a jamais manifesté d’agressivité envers les humains ».

Ce n’est qu’au bout de 2,5 mois que sa propriétaire a pu enfin lui enlever et lui remettre son licol avant sa sortie au pré. L’utilisation de bonbons en guise de récompense a beaucoup aidé. Mais il a fallu encore des mois avant que Nina n’accepte de simples caresses sur sa tête !

Nina, 3 jours après son arrivée. La petite corde attachée à son licol nous permet de l’attraper plus facilement pour la ramener à son box tout en douceur.

Un avenir plein d’espoir

Face aux traumatismes qu’elle avait subis et à la lenteur de leur guérison, les propriétaires de Nina ont finalement sollicité l’accompagnement de professionnels équestres. Cela a permis à Nina de bénéficier d’une désensibilisation à ses divers traumatismes. La manipulation de ses pieds n’était pas simple et il fallait que le maréchal-ferrant puisse intervenir en toute sécurité. Il lui fallait aussi apprendre le calme durant la présence du vétérinaire lors des soins de base tels que les vaccins et les examens médicaux, la visite du dentiste et de l’ostéopathe. De plus, la douche et le contact sur un sol bétonné mouillé lui était insupportable. Seule Nina sait véritablement d’où proviennent ses traumatismes, et il a fallu du temps pour que ces exercices se déroulent de la meilleure manière possible, tant pour elle que pour ses propriétaires.

Un plus grand espace

Face aux progrès notables de Nina et de ses propriétaires, elle a été introduite dans un pré de 3 hectares en compagnie de plusieurs de ses congénères. Le rituel du soir, l’appel pour le dîner, la ramenait d’elle-même aux écuries. Dans ce vaste espace, elle a pu s’épanouir pleinement et a ainsi commencé à vivre une véritable vie de cheval.

Nina avec ses compagnons de pré.

L’évolution de Nina

Trois ans après son arrivée, Nina connaît une transformation remarquable, tant sur le plan physique que mental. Sa posture s’est nettement améliorée, sa démarche est devenue plus gracieuse, et elle ne redoute plus les caresses légères ni les tapes douces. Contrairement à ses débuts, où elle se tenait timidement dans son box sans montrer le bout de son nez, Nina se montre désormais enthousiaste à l’idée de sortir et d’interagir.

Son attitude envers les humains a subi une évolution significative. Son regard n’affiche plus de peur, et elle prend plaisir à jouer avec sa propriétaire. L’un de ses jeux préférés consiste à jouer à la « prise au pré », où elle prend son temps pour être attrapée et retourne vers sa propriétaire en secouant joyeusement la tête ! Elle apprécie désormais les soins attentionnés, qu’il s’agisse de brossages, de massages, ou simplement d’un moment avec sa propriétaire.

Stéphanie a également dû faire preuve de patience et de sérénité pour accompagner sa jument. Chaque jour, elle s’efforçait de s’approcher de son cheval avec maîtrise de soi, gardant une grande quiétude afin de ne pas transmettre involontairement de stress à son compagnon équin. C’était un exercice quotidien exigeant, visant à créer un environnement apaisant pour leur relation.

« Souvent, le soir, je consacrais du temps à brosser Nina dans son box, accompagnée d’une douce musique en arrière-plan. Je suis convaincue qu’avant d’arriver chez nous, Nina n’avait jamais expérimenté la douceur d’un coup de brosse sur son pelage ni même le simple geste d’une caresse. J’essayais de surmonter mes propres appréhensions face à cette petite jument timide et imprévisible. Je ne regrette pas les heures passées en sa compagnie, car elles m’ont permis de mieux la comprendre tout en faisant également des découvertes sur moi-même », explique Stéphanie.

« Une belle victoire face à l’évolution de Nina, tout juste 1 an après son arrivée. À l’approche de ma fille, Nina lui fait confiance et reste couchée… », explique Stéphanie.
Nina lors du pansage, 3 ans après son arrivée chez nous.

Le débourrage

À l’âge de 4 ans, Nina a été débourrée par une professionnelle expérimentée qui a pris en considération les traumatismes passés de la jument. Elle a été transportée à une heure de route de son domicile et est restée sur place pendant un mois. Ce changement d’environnement a été une expérience nouvelle pour Nina, et il est probable qu’elle ait ressenti de l’appréhension lorsqu’elle a dû monter dans le van. Cependant, cette épreuve était essentielle pour l’aider à se dépasser et à développer sa sociabilité dans le monde équin et humain.

Nina pendant le débourrage à pied
Nina pendant le débourrage, montée par Calliane DECERLE, spécialiste en débourrage équin

L’après débourrage

En raison des nombreux traumatismes et séquelles physiques qu’elle avait déjà endurés durant sa jeunesse, sa propriétaire a pris la décision de ne pas monter Nina, afin de prévenir tout risque de douleur supplémentaire pour son dos.

Conclusion

Nina, malgré les traumatismes physiques et émotionnels qu’elle a subis, a fait preuve d’une résilience remarquable. Grâce à la patience, à la compréhension et à l’amour de sa nouvelle famille, elle a peu à peu retrouvé sa vitalité et sa confiance en l’humain. Chaque jour, Nina continue de relever des défis, ce qui illustre sa force et sa confiance retrouvées.

Les petites victoires quotidiennes, comme le fait de pouvoir la caresser sans qu’elle ne sursaute, témoignent de la puissance de sa transformation. Cette réhabilitation a été rendue possible grâce au soutien et à l’expertise des professionnels équestres spécialisés, dont le dévouement a été essentiel pour aider Nina à se remettre de ses traumatismes et à vivre une vie épanouie.

L’histoire de Nina est un rappel sur l’importance de la compassion, de la persévérance et de l’amour nécessaires pour aider les animaux maltraités à se rétablir et à retrouver leur dignité. Nina incarne la résilience des chevaux et nous rappelle qu’avec le bon environnement et les soins appropriés, ils peuvent se rétablir et trouver une vie meilleure.

En résumé, l’histoire de Nina est une source d’inspiration et de motivation. Elle nous montre la puissance de l’esprit et la capacité des animaux à se relever de l’adversité. Son parcours nous enseigne la valeur de la patience, de la compassion et de la détermination dans le sauvetage et la réhabilitation des animaux maltraités.

Ce qui disent les textes de loi

Depuis l’adoption de la loi du 10 juillet 1976 portant sur la préservation de la nature, un cadre strict a été établi pour protéger les animaux domestiques ainsi que tous les animaux en captivité contre les mauvais traitements. Cette législation reconnaît sans équivoque la sensibilité des animaux.

En conséquence, les propriétaires ou les responsables des chevaux sont légalement obligés de garantir que ces animaux sont hébergés dans des conditions qui respectent pleinement les besoins biologiques de leur espèce. Il convient de noter que la loi prévoit des sanctions sévères pour tout acte de maltraitance envers les animaux.

Malgré l’existence de ces dispositions légales visant à protéger les équidés, il subsiste encore de nombreux cas de maltraitance, d’abandon et de menace d’euthanasie. En 2021, en France, 5 252 chevaux ont été abattus, et 5 207 chevaux ont été exportés en vue d’être abattus, selon les données de FranceAgrimer et de l’Institut Français du Cheval et de l’Équitation.

Un grand nombre d’organisations, parmi lesquelles la Fondation Brigitte Bardot, la Société Protectrice des Animaux (SPA), Cheval Espoir 33, Ehpadequus, Au-delà des pistes et de nombreuses autres, œuvrent activement pour la protection des animaux.

On ne rappellera jamais assez que chaque propriétaire et gardien d’équidés est responsable de leur bien-être. Depuis le 1er janvier 2023, une nouvelle loi a été instaurée, exigeant la détention d’un certificat d’engagement de connaissances pour les propriétaires d’équidés. Cette mesure vise à lutter contre le manque de connaissances, qui peut conduire à la maltraitance des équidés.

L’équipe de Cheval Partenaore

Crédit photo @Cheval Partenaire

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