Ils sont nombreux et nous énervent au plus haut point tant ils nous rendent impuissants ! Voici la liste des tics que nos chevaux peuvent développer et la liste des choses que nous pouvons faire pour éviter ce type de comportements.
Le cheval apprend vite mais malheureusement il prend aussi très vite les mauvaises habitudes. On peut observer chez grand nombre de chevaux des comportements répétitifs et stéréotypés, que l’on nomme vices ou tics (troubles involontaires compulsifs) car ils semblent indépendants de la volonté du cheval.
Les stéréotypies se développent dans des environnements non optimaux qui fournissent trop peu de stimuli pour le développement normal de l’animal. Elles résultent donc d’une interaction anormale entre l’animal et son environnement (Carlstead, 1998) et peuvent prendre différentes formes.
Il y a deux familles de tics, les stéréotypies orales et les stéréotypies locomotrices.
Dans les stéréotypies orales, nous retrouvons :
- Le tic à l’appui : le cheval fait grincer ses incisives contre un objet, le plus souvent sur la porte de son box et même des piquets de clôtures en bois.Il va sans dire qu’il cause des dégâts considérables sur ses incisives.
- Le tic à l’air : le cheval qui tique à l’air prend la même posture d’encolure que le tic à l’appui et fait le même bruit sans prendre appui sur un support.
- Le tic de l’automutilation : Le cheval s’inflige des morsures sur les flancs, le ventre, les membres et toutes autres parties du corps qui lui sont accessibles.
- Lignophagie : qui se caractérise par l’ingestion de bois.
- Certains tapent sur les parois de leur box avec un antérieur ou un postérieur. On parle de taper au box ou stall-kicking.
Dans les stéréotypies locomotrices, nous retrouvons :
- Le tic de l’ours : Le cheval balance continuellement son encolure de droite à gauche en reportant successivement le poids de son corps d’une jambe sur l’autre. Il exécute ce mouvement en se plaçant devant la porte de son box et en passant sa tête par-dessus.
- Le tic à l’encensé : le cheval secoue sa tête violemment de haut en bas sans interruption.
- Le tic déambulatoire : le cheval tourne inlassablement dans son box.
Les ticsou stéréotypies sont des symptômes : Le cheval réalise des mouvements non productifs apparemment sans but, répétitifs, on parle alors de comportements stéréotypés.
Le cheval subissant du stress ou des frustrations, de l’ennui, va inventer des comportements, il s’agit de phénomènes de compensations : le cheval élabore un comportement pour remplacer celui, plus adapté, qu’il ne peut réaliser. Cela lui procure un soulagement. En effet, la non réalisation d’un comportement crée un besoin de « faire quelque chose » : les ressources mobilisées par l’organisme peuvent donc être utilisées. Sous l’effet d’une inquiétude, vous marchez en rond autour de votre bureau, vous compensez le fait de ne pas avoir déjà une solution en dépensant de l’énergie à vous agiter.
Si la situation frustrante et /ou stressante perdure, le cheval se réfugiera plus souvent dans cet exutoire et il va le ritualiser. La plupart des rites ont un effet apaisant et peuvent permettre la réalisation sereine (plus ou moins) d’un acte habituellement générateur de stress ou l’acceptation d’une situation (rituel avant d’entrer sur scène, rituel du couché pour les enfants…). L’organisme sécrète alors des endorphines qui apaisent le cheval et lui procurent du bien-être.
Il ne faut pas empêcher un cheval de tiquer :
Le cheval souffre qu’on l’empêche de tiquer, d’autant plus qu’il n’est pas capable de comprendre pourquoi.
Pensez bien que le tic n’est pas une bêtise du cheval, c’est une manifestation de son mal-être qui de plus le soulage ! Les stratagèmes mis en place pour mettre fin aux tics ne sont jamais concluants : très souvent, le cheval redirige son exutoire vers autre chose, un autre tic, souvent pire. Ainsi, une proportion signifiante de chevaux mutilés pour les empêcher de tiquer à l’appui sont devenus agressifs ou auto-agressifs.
Les stéréotypies semblent donc avoir une fonction adaptative et leur suppression pourrait avoir des conséquences importantes sur le bien-être.
Quelles sont les causes de ces comportements anormaux ?
On a longtemps pensé que les tics se transmettaient d’un cheval à l’autre par mimétisme mais aucune étude scientifique n’est parvenue à étayer cette théorie. On sait cependant que bon nombre de vices trouvent leurs origines dans le sevrage et le régime alimentaire du poulain. Cependant, les conditions de vie du cheval sont aussi montrées du doigt. En effet, un cheval confiné 23 heures sur 24 dans un box s’ennuie et stresse.Il va donc développer des comportements anormaux pour s’occuper et décharger une tension nerveuse devenue trop forte.
Les conséquences des stéréotypies sur la santé du cheval :
Le lien entre tic à l’appui et colique n’est pas démontré car l’air n’est pas ingéré lors de la réalisation du tic. En revanche,un lien est bien établi entre tic à l’appui et incarcération de l’intestin grêle dans le foramen épiploïque. (Le foramen épiploïque ou omentalest une zone du tube digestifpermettant la communication du grand sac péritonéa, avec le vestibule du petit sac péritonéal.).
Les chevaux qui tiquent à l’appui présentent davantage d’ulcères gastriques mais le tic ne semble pas en être la cause, l’anxiété serait l’élément déclencheur à la fois de la stéréotypie et des ulcères.
Le tic à l’appui peut engendrer une usure anormale des incisives.
L’ingestion de terre ou de bois peut engendrer respectivement des coliques de sable ou des obstructions.
Enfin, une perte d’état peut être la conséquence de nombreux tics (les chevaux passant davantage de temps à tiquer qu’à se nourrir).
Prévenir les tics :
Un cheval tique parce qu’il s’ennuie ou parce qu’il est soumis à un stress trop intense.
À l’état naturel, le cheval mange au moins 14 heures par jour, a des compagnons, marche presque toute la journée et il a la possibilité de fuir en cas de peur. Un cheval à qui l’on empêche de faire tout cela, voit son organisme se déséquilibrer, il aura donc besoin de trouver des palliatifs aux fonctions naturelles pour apaiser la tension que le non- accomplissement de ces activités aura provoqué.
Pour prévenir l’apparition d’un comportement compensatoire, il faut donc donner au cheval les moyens de satisfaire au mieux ses besoins physiques et physiologiques.
Le cheval doit manger la majeure partie de la journée, il faut donc privilégier les repas longs à manger (foin, et même paille si sa litière n’en est pas composée) peu riches, pour en augmenter le volume. Il faut aussi fractionner au maximum les repas, ce qui a enplus l’avantage de couper la journée et de mieux occuper le temps du cheval. Attention à ne pas suralimenter le cheval sous ce prétexte : outre les problèmes de santé liés au surpoids, un excès d’énergie, n’ayant pas d’exutoire, peut aussi favoriser l’apparition de tics.
Le cheval doit avoir des compagnons, plusieurs si possible et pouvoir entrer en contact physiques avec eux, ne serait-ce que nez à nez à travers une grille. Le mieux étant bien sûr un minimum de deux chevaux dans un pré ou dans un même box suffisamment grand. Bien sûr, mettre trop de chevaux, dans un espace trop petit, n’est pas une bonne chose : on ne doit pas forcer les chevaux à un contact permanent. C’est le cas dans les écuries composées de petits boxes, où les chevaux n’ont aucun moyen d’éviter leurs congénères et peuvent en conséquence déclencher des tics d’agressivitésn’arrivant jamais à maintenir un espace personnel suffisant.
Dans le cas où il est impossible de lui offrir la présence d’un compagnon de son espèce, un autre compagnon est appréciable : chat, poule, chèvre… Il faut donner au cheval l’occasion de se déplacer.
et on doit veiller à lui faire faire suffisamment d’activité, afin qu’il ne stocke pas d’énergie superflue, ce qui augmenterait son éventuelle nervosité et donc le risque d’apparition de tics.
Dans le cas d’un cheval en box, ou d’un cheval seul (mais c’est aussi très profitable pour un cheval ayant une vie plus naturelle), il faut veiller à occuper ses journées.
Voici différents moyens pour cela :
- Les mouvements d’autres animaux et des humains autour des boxes et des prés peuvent stimuler l’attention du cheval.
- On peut, dans la mesure du possible, venir soigner le cheval plusieurs fois dans la journée au lieu de tout grouper en une fois
- Pour les chevaux n’allant pas au pré, il est très profitable que ceux-ci soient sortis du box pendant que celui-ci est nettoyé : c’est l’occasion pour le cheval de changer un peu d’environnement, il peut aussi être sorti pour le pansage, promené en main et le faire brouter. Un cheval ne peut pas rester enfermé au box 24h/24 ! Son équilibre mental en est fortement perturbé.
Facteurs prédisposant au développement de stéréotypies | |
Facteurs environnementaux |
|
Facteurs génétiques |
KILEY-WORTHINGTON et WOODGUSH (1987) |
Âge |
|
Sexe |
|
Type racial |
|
Discipline exercée |
|
Cependant, encore une fois, le trop est l’ennemi du bien : les chevaux ont besoin de stimulations, mais aussi de calme. Devant trop d’agitation, le cheval peut se sentir agressé ou tout simplement irrité, apeuré et développer des troubles comportementaux pour palier à ces difficultés.
Si le travail est une solution pour le stimuler sans le stresser, il est aussi l’occasion d’occuper le cheval, de le débarrasser d’un trop-plein d’énergie, de le faire bouger, attention toutefois car un travail abusif (trop long ou trop intense) ou réalisé dans l’énervement peut aussi provoquer des montées de stress qui, répétées,peuvent causer des tics comme celui de l’encensement.
En résumé, pour préserver les chevaux des troubles involontaires compulsifs, il faut les maintenir dans des conditions les plus proches possible de leur état naturel avec des compagnons, des sorties quotidiennes au pré, une alimentation respectant leursystème digestif, des soins quotidiensadaptés à leur mode de vie et un travail réalisé dans le respect et le calme.
Source : Thesevétérinaire du Dr Luquet Joséphine « CONTRIBUTION A L’ETUDE DU BIEN-ETRE ANIMAL EN MILIEU HOSPITALIER : APPLICATION AUX CARNIVORES DOMESTIQUES ET AUX CHEVAUX »