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Le rejet le 15 janvier dernier de l’accord sur le Brexit par les députés britanniques amène à s’interroger sur les conséquences d’un « no deal » sur les modalités de sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne, dont la date est fixée au 29 mars 2019, en ce qui concerne la circulation des chevaux.
Au cœur de la problématique de cette sortie sans accord se trouve la libre-circulation des biens et des personnes qui risque d’être remise en cause par le Brexit, à compter de cette date.
Cette question est loin d’être anecdotique en ce qui concerne les équidés puisqu’on dénombre, rien que pour les pur-sang, 26.000 mouvements entre le Royaume-Uni, la France et l’Irlande chaque année, auxquels il faut ajouter les autres chevaux de course et de sport.
Dès les années 60, un accord tripartite (TPA) avait été signé entre ces trois pays, accord intégré à la législation européenne lors de l’entrée de l’Irlande et du Royaume-Uni en 1973 dans la Communauté Economique Européenne, devenue l’Union Européenne en 1993.
Le TPA a été régulièrement mis à jour depuis. L’actuel TPA, en application depuis 2014 et valable jusqu’en 2020, prévoit notamment une libre-circulation des chevaux grâce à un document (DOCOM, attestation ou certificat sanitaire selon les cas). Mais, compte-tenu de son intégration dans la réglementation européenne, en l’absence d’accord sur les modalités du Brexit, l’actuel TPA ne pourra pas continuer à être appliqué et un contrôle aux frontières sera mis en place, le Royaume-Uni devenant un pays tiers à l’UE. Etant donné le volume des mouvements, la situation risque d’être difficile à gérer et d’impacter lourdement le bien-être des chevaux, ce qui ne cesse d’inquiéter la filière, même si les autorités se veulent rassurantes et projettent d’organiser au mieux des mesures transitoires.
Les exportations vers le Royaume-Uni ne devraient pas être trop affectées, puisque les autorités britanniques indiquent que « l’importation d’équidés au RU depuis l’UE ne changera pas immédiatement après la sortie de l’Angleterre et de l’Irlande de l’UE» car elles « reproduisent les systèmes actuels » (DOCOM, attestation ou certificat sanitaire selon les cas).
A l’inverse les importations dans l’UE en provenance du Royaume-Uni risquent d’être plus fortement impactées.
Des discussions sont actuellement en cours afin que le Royaume-Uni soit listé comme pays tiers dès le jour de sa sortie, au même titre que la Nouvelle-Zélande ou l’Australie par exemple.
A défaut, aucun mouvement de chevaux depuis le RU vers l’UE ne pourrait plus être effectué.
Cette première condition devrait pouvoir être satisfaite, le Royaume-Uni répondant aux exigences européennes en matière de santé animale.
Dès lors que le RU sera listé comme pays tiers, outre les documents d’identification des équidés, les chevaux devront présenter un certificat de bonne santé (Export Health Certificate EHC) que ce soit pour une entrée temporaire ou permanente qui remplacera l’actuel DOCOM ou l’attestation vétérinaire. Il convient en outre de noter que les contrôles vétérinaires sont à la charge de l’exportateur.
Côté français, le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé le 19 janvier, le déclenchement d’un « plan lié à un Brexit sans accord » pour faire face à cette éventualité « de moins en moins improbable » sous la forme d’une loi d’habilitation afin de permettre au Gouvernement de prendre cinq ordonnances afin de fixer le cadre juridique d’un Brexit sans accord.
L’Ordonnance n° 2019-36 du 23 janvier 2019 « portant diverses adaptations et dérogations temporaires nécessaires à la réalisation en urgence des travaux requis par le rétablissement des contrôles à la frontière avec le Royaume-Uni en raison du retrait de cet Etat de l’Union européenne » prévoit, dans son article 6, que les contrôles portant sur les animaux originaires ou en provenance du Royaume-Uni et à compter de la date d’un retrait sans accord de cet Etat de l’Union européenne, peuvent « n’être effectués qu’après leur entrée sur le territoire métropolitain, dans des centres situés à proximité de leur point d’entrée dont la liste est fixée par arrêté conjoint du ministre chargé de l’agriculture et du ministre chargé des douanes ».
Cette mesure s’accompagne de la création de 600 postes « de douaniers, de contrôleurs vétérinaires et d’agents de l’État, qui vont permettre, là encore, d’être à la hauteur des enjeux, et des contrôles nécessaires » selon le Premier Ministre.
Ces mesures devraient permettre, sans doute, d’éviter des délais d’attente trop longs et potentiellement préjudiciables aux animaux de nature à rassurer la filière équine dans l’attente d’un nouvel accord qui, sur la base d’une solution technique nommée 3HS pour High Health Horse Status, permettrait aux chevaux de courses et d’élevage ainsi qu’aux chevaux de la FEI de bénéficier d’un contrôle allégé.
L’adoption de cette solution, à l’étude depuis deux ans, est actuellement au point mort tant que des discussions sont en cours sur un accord global pour organiser le Brexit.
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