26 octobre 2021 - Disciplines

INTERVIEW AVEC MARIE DEMONTE

Dossier
Marie DEMONTE

C’est sur le superbe pôle hippique Lou Chibaou à Barbaste (47) que nous avons partagé un agréable moment avec la brillante Marie DEMONTE, cavalière internationale de CSO et présélectionnée pour les JO 2024. C’est tout sourire et pleine de dynamisme que nous la retrouvons et qu’elle nous parle d’elle, de son histoire et de ses chevaux.

Comment a débuté votre passion pour les chevaux et le CSO Marie ?

Marie DEMONTE

« Mon grand-père avait une grande propriété à Grenade sur Garonne en région toulousaine, ma mère était étudiante en médecine lorsque je suis née et mon père qui n’était pourtant pas du tout dans le monde du cheval avait la passion de l’élevage notamment des anglo-arabes.

J’ai donc grandi au milieu des chevaux en pleine nature. Mes parents m’ont offert une petite ponette Welsh très tôt dans mon enfance puisque j’ai fait mon premier concours lors d’une « fête équestre » à l’âge de 5 ans ! Mon enfance a été synonyme de fêtes équestres et je montais également avec ma mère qui avait de bonnes bases d’équitation en complet et en CSO. Elle m’apprenait et je prenais un réel plaisir à monter à cheval.

Ce que j’aimais le plus : le GALOP à fond et le SAUT ! Il ne fallait pas me parler de rester au pas, de trotter, de dresser … Mon adrénaline, c’était la vitesse et c’est toujours le cas aujourd’hui ! ».

Quand a réellement débuté votre carrière de compétitrice ?

« Par la suite, j’ai eu d’autres poneys, j’ai fait des championnats à la Motte Beuvron puis j’ai eu mon premier cheval qui s’appelait Daswam avec lequel j’ai fait les juniors. 

J’ai également eu une jument née à l’élevage de ma mère, HIJA DE MONTAGNE qui m’a amenée jusqu’au Grand Prix 1m50. De ses 4 ans jusqu’à ses 15 ans, elle m’a accompagnée, nous avons gagné ensemble des CSO 2 Etoiles, 3 Etoiles, Grand Prix 1m50, … C’est LA jument qui m’a mis le pied à l’étrier dans ma vie de cavalière ». 

Parlez-nous de votre cadre de travail :

« Je suis très heureuse d’avoir élu domicile pour mon écurie chez Xavier TROUILHET (Ancien cavalier international, chef de piste national Elite et organisateur) au Pôle Hippique Lou Chibaou à Barbaste. Je bénéficie d’une belle infrastructure clé en main qui me permet de me focaliser uniquement sur le sport et sur le travail du cheval avec des équipements de qualité : plusieurs carrières, un manège, un parc d’obstacles complet… Tout est mis en place, tout fonctionne, je n’ai plus qu’à me concentrer sur le travail des chevaux. On a du personnel en place qui est au top et notre équipe fonctionne vraiment très bien !

Chaque hiver avec Xavier TROUILHET nous organisons des stages et en début d’année Albert VOORN – cavalier International de sauts d’obstacles néerlandais – vient pendant quatre jours dispenser des journées d’entrainement. Je connais Albert depuis l’âge de 20 ans et depuis nous travaillons ensemble chaque année. Pour Albert, le cheval doit être le centre d’attention et tout doit être fait avec lui en évitant la contrainte. C’est un concept que j’aime ! ».

Vos chevaux ?

Marie DEMONTE

« Nous avons à ce jour une douzaine de chevaux dont un qui m’appartient et le deuxième à ma mère, mais aussi des chevaux en pension travail, des chevaux de l’écurie du Herrin… Nous avons la chance d’avoir de très bons chevaux performants sur 1m50 et plus :  Vega de la Roche, Las Vegas Vd Padenborre, Manchester, Apremier, … et bien sûr de jeunes chevaux très prometteurs de 7 et 8 ans ».

Votre vision du cheval et de son travail ?

« À mon sens, écouter et découvrir son cheval est la base de tout cavalier. J’essaie toujours de le mettre dans la facilité et notre position à cheval est également primordiale. Je prends le temps de mieux connaitre mes chevaux,

j’essaie de trouver leur fonctionnement, certains préfèrent sortir trois fois par mois en concours, d’autres plus, ils sont tous différents. C’est une question de feeling et pas tant de niveau. Les personnes qui travaillent avec moi partagent le même état d’esprit. Le cheval ressent cette cohésion d’équipe et la même façon de gérer son quotidien selon le caractère de chacun.

Cela prend du temps de s’adapter à chaque cheval mais c’est un réel bonheur d’avancer dans ce sens, de créer notre relation particulière entre nous et le cheval ! ».

Vos conseils sur le débourrage et le travail du jeune cheval ?

« Commencer à débourrer un cheval à 4 ou 5 ans, ça ne change pas grand-chose pour son avenir. Le plus important est de bien le faire. C’est l’expérience qui fait qu’on a le ressenti et il faut avoir la conviction d’aller jusqu’au bout pour réussir. C’est notre état d’esprit qui fait qu’on longe bien ou non un cheval, on sait si l’exercice est adapté à lui et on va jusqu’au bout de notre demande.

Une fois que les chevaux sont débourrés, qu’ils ne bougent pas au montoir, on peut commencer par sauter des obstacles faciles, des barres de réglage au trot, puis au galop, etc.

A mon sens, c’est primordial de ne pas mettre de grosse pression au travail à un cheval de 4 ans. Je fais évoluer le travail à partir de 5 ans. Personnellement, je cherche à ce que le cheval s’exprime librement et je découvre ainsi ses qualités et ses faiblesses. Je recherche en priorité les qualités du cheval. 

Les embouchures de type Pelham bride devraient être absolument interdites à 4 et 5 ans car on désensibilise le cheval à la bouche et on détériore la qualité du saut. Je pense qu’ainsi on casse le travail d’expression et de découverte de notre cheval ». 

Comment gérez-vous le stress chez vos chevaux ?

« Lorsque certains chevaux de tête ont toujours des tocs malgré nos efforts de désensibilisation, j’essaie dans ce cas de limiter leur stress.  Ma jument Vega de la Roche a la phobie d’être seule. Lors des déplacements, elle est tellement stressée que je dois amener un autre cheval avec elle. Par expérience, limiter le stress du cheval contribue à ce qu’il gagne en concours. 

J’aime mettre des codes à un cheval au fur et à mesure que j’apprends à le connaître. 

Préfère-t-il travailler le matin ou  l’après-midi, quel exercice lui convient  avant d’aller en concours ? On ne met pas un cheval dans un moule ! On travaille la qualité du cheval et jamais son défaut. Lorsque mon cheval ne veut pas se plier à droite ou qu’il est tordu à gauche, il ne faut pas aller dans le défaut du cheval. Dans ce cas, je le travaille dans le relâchement et la qualité, j’obtiens ainsi les deux côtés du cheval. Il faut accepter que son cheval soit plus à l’aise d’un côté que de l’autre. C’est tout simplement de l’observation, de la logique, du respect pour notre cheval ».

Quel est l’importance du travail à pied dans votre écurie ?

« Le travail à pied est extrêmement important, c’est la base de travail notamment pour lui apprendre à respecter notre espace lors de la marche en main. Cet hiver lors du confinement, on en a profité pour faire un peu plus de travail éthologique. J’ai réalisé de petites vidéos rigolotes notamment avec Las Vegas qui me suit et qui saute un obstacle en liberté. C’est un beau moment de complicité du couple Homme-Cheval.

Je résous souvent des blocages grâce au travail à pied afin de ne plus avoir le problème à cheval. Les petits problèmes de comportement montés, les 

chevaux capricieux ou encore ceux qui bloquent à la porte ou qui ne veulent pas aller en promenade sans un autre cheval. C’est intéressant de travailler ces blocages à pied. Si on gagne sur tous ces exercices là à pied, on gagne après à cheval ».

Le cavalier que vous admirez et les gens qui vous entourent ?

« Lorsque j’étais un peu plus jeune, j’admirais Eric NAVET. Il inspirait la classe à cheval ! Un grand technicien qui mettait les chevaux dans un mouvement en avant fabuleux. J’adore également Albert VOORN, son concept : ce que donne le cheval en liberté, il doit le reproduire avec le poids du cavalier. C’est une belle personne qui a la tête sur les épaules, un vrai sportif et un  « mec » d’échéances !

Et bien entendu mes parents et ma meilleure amie Anne-Sophie qui font partie des gens qui me supportent, qui me suivent, qui m’aident. L’équipe des grooms est aussi très importante pour moi ainsi qu’Olivier ROBERT avec qui on se retrouve beaucoup dans la façon de monter ».

Marie DEMONTE

La place des sponsors dans votre vie de cavalière Internationale ?

« Les sponsors nous aident et nous contribuons à leur image. Dans le monde équestre, on fait face à énormément de dépenses, nous vivons grâce aux gains et aux rentes. Les partenaires nous soutiennent de façon formidable dans leur domaine : CAVALOR, HIPASSUR, GEM, CAVALERIA, la sellerie CHEMIN & PADDOCK…  

Ces aides sont nécessaires pour nous mais nous connaissons des périodes financièrement difficiles notamment lors de confinements liés à la Covid ou à la rhinopneumonie. Nous devons assumer les frais importants entre les structures, les chevaux, le personnel… C’est un métier de passion où nous ne comptons pas nos heures malgré des dépenses qui s’avèrent être souvent imprévues et conséquentes ».

Quels sont vos objectifs à plus ou moins longs termes ?

« Bien entendu les JO de Paris 2024 ! On ne sait pas encore avec quel cheval mais on s’y prépare, on travaille, on est bien encadré ».