La mise à l’herbe de printemps est synonyme tous les ans de cauchemar pour toutes les races faciles d’entretien et de bonheur pour tous les chevaux qui ont du mal à garder de l’état en hiver. Nous allons voir pour quelles raisons.
Vouloir se rapprocher le plus possible de l’alimentation naturelle d’un cheval est un souhait tout à fait louable. Quand on garde son équidé à la maison, il est évident que l’on cherche le meilleur pour son épanouissement et son bien-être. Mais tous les ans, nous sommes confrontés aux aléas de la pousse de l’herbe qui nous compliquent la vie.
Avant de lâcher vos fauves, du jour au lendemain, dans les vertes pâtures, il est essentiel de prendre les dispositions suivantes :
– faire une transition progressive à l’herbe sur une quinzaine de jours pour permettre à la flore intestinale de s’adapter.
– s’assurer que son équidé a perdu du poids pendant l’hiver pour anticiper la surcharge pondérale pendant la saison de pâturage.
Prenons le cas de POMPOM, cheval de loisir de 500 kg effectuant 2 ou 3 sorties par semaine en ballade.
Ses besoins journaliers sont les suivants :
Si je mets POMPOM au pâturage, celui-ci va bien évidemment manger toute la journée sans s’arrêter. Il va donc consommer au minimum ses 9.5 kg de matière sèche quotidiens.
Une herbe de prairie permanente moyenne apporte par kg de matière sèche :
POMPOM va donc ingérer quotidiennement :
Si on compare les besoins avec les apports :
L’herbe gardera cette valeur pendant environ 1 mois et demi (si vous avez de l’herbe en abondance), de mi-avril à fin mai. Puis sa valeur va diminuer avec l’apparition des épis dans les graminées.
Quelle va être la prise de poids de POMPOM pendant ces 1.5 mois ?
3.4 UFC (en trop/jour) * 45 jours = 153 UFC en trop sur 1.5 mois
POMPOM va utiliser 2.7 UFC pour grossir de 1 kg.
Au bout du compte, il aura donc pris 153/2.7= 56 kg en 1.5 mois soit environ 11% de son poids.
Quand l’herbe sera au stade floraison elle sera beaucoup moins énergétique
POMPOM va donc ingérer quotidiennement en juillet :
A cette période d’été, POMPOM va stabiliser son poids.
Vous voyez donc ici tout l’intérêt de bien gérer votre pâturage pour faire en sorte de rationner l’herbe au printemps.
La prise de poids réalisée au printemps (et aussi en automne) doit absolument être compensée par une perte de poids en hiver. Vous vous exposez sinon à des fourbures, des maladies métaboliques comme le diabète.
La fourbure au pâturage survient pour plusieurs raisons :
- Le cheval a un accès non limité à l’herbe. Même si celle-ci est peu ou très riche selon les saisons, le fait que le cheval ne puisse pas se réguler (et oui il peut manger de l’herbe sans s’arrêter !) va entraîner un trop plein d’ingestion de sucres solubles. Tout comme nous devant une plaquette de chocolat, un peu c’est bien, toute la plaquette c’est trop !
- Le cheval est sur de l’herbe rase (surpâturée). Même si la quantité d’herbe est ridicule, cette petite herbe est extrêmement riche en sucres. Il en suffit de peu pour déclencher une fourbure sur un équidé déjà fragile.
- Votre cheval a une maladie métabolique de type Cushing, SME (Syndrôme Métabolique Equin), PSSM (Myopathie à stockage de polysaccharides) et de fait ne tolèrera que très peu de sucres dans son alimentation. Tout excès dans ces cas-là peut conduire à une fourbure.
Pour éviter ces problèmes, plusieurs pistes sont possibles :
- Donner un carré d’herbe tous les jours et ne pas laisser pâturer sur de grandes parcelles tout en laissant un accès à des pistes pour favoriser le mouvement.
- Attendre que l’herbe soit à un stade avancé pour mettre les chevaux afin qu’elle soit moins riche en sucres. Plus l’herbe est haute, moins elle est riche.
- Utiliser un panier de pâturage (Greenguard) permet de limiter la quantité d’herbe ingérée quotidiennement (-50% d’ingestion environ) et de faire maigrir le cheval.
Dans tous les cas, le bien-être de votre cheval ne peut pas passer par un état corporel excessif. Aimer son cheval, c’est faire en sorte que son corps soit en adéquation avec son espèce.
Les kilos en trop sont l’ennemi de l’effort sportif.
PEYRILLE Sabrina
Nutritionniste équin
06 58 00 95 48