Quel est intérêt de l’IRM pour le diagnostic des boiteries du cheval ?
L’I.R.M ou Imagerie par Résonance Magnétique est une des techniques d’imagerie dont le vétérinaire dispose aujourd’hui pour diagnostiquer de manière pertinente les boiteries du cheval et proposer ainsi le traitement le plus adapté. La première machine IRM humaine a été installée en 1983 alors que les premières images d’IRM sur cheval vivant ont été acquises en 1997 aux États-Unis.
Il existe deux types de systèmes d’imagerie IRM : le système IRM « haut champ », le cheval est anesthésié et donc couché pour réaliser l’examen et le système IRM « bas champ ». Pour ce dernier, le cheval est tranquillisé et donc debout.
Nous allons nous intéresser ici aux avantages du système IRM « bas champ » que nous possédons au Centre Hospitalier « La Clinique du Cheval » à Grenade.
Comment se déroule un examen IRM ?
Le cheval est examiné, puis déferré pour éviter les interférences avec l’aimant. Pour les examens IRM de pied, il est nécessaire de réaliser un cliché radiographique pour vérifier qu’il ne reste pas de clous pouvant être à l’origine d’artefacts sur les images et donc d’une mauvaise interprétation. Le cheval est tranquillisé pour avoir un animal vigile, donc debout. La sédation est nécessaire pour positionner correctement l’animal dans le système d’imagerie et aussi éviter qu’il ne bouge pour avoir des images de qualité et donc interprétables.
Le cheval est ensuite amené en salle d’IRM, pièce totalement isolée appelée Cage de Faraday. Il faut alors placer la région à imager (le pied, le boulet…) au centre de l’aimant tout en pointant l’antenne réceptrice sur la région à imager. Un aide tient le cheval et le maintient le plus immobile possible. L‘examen peut alors commencer.
L’acquisition des images IRM se fait en utilisant des séquences. Une séquence fournit une série d’images (coupes) parallèles les unes aux autres. Les coupes IRM peuvent être réalisées dans n’importe quelle direction de l’espace. L’acquisition des images est réalisée selon des protocoles qui permettent d’observer toutes les structures avec différents types de pondérations. Selon l’image obtenue dans les différents types de séquences, on pourra dire si les lésions tendineuses et/ou ligamentaires sont actives ou chroniques, si l’on trouve une inflammation osseuse, des résorptions osseuses, des traces de sang, etc.
Après l’acquisition, les images sont visualisées et interprétées. Pour poser un diagnostic, on prendra bien sûr le soin d’associer les lésions visibles à l’IRM avec l’examen clinique du cheval.
Cet examen peut durer entre une et deux heures selon la région concernée et le nombre de régions. Le propriétaire peut assister à l’examen car il ne comporte aucun risque de radiation à l’instar de la radiographie. Cependant, il est important de prévoir suffisamment de temps si l’on veut y assister.
Pourquoi prescrire un examen IRM ?
L’intérêt majeur de l’IRM est de mettre en évidence des lésions non visibles en radiographie et en échographie qui peuvent être à l’origine d’une boiterie. Comme nous l’avons évoqué précédemment, ces examens peuvent être longs ; pour cette raison, cette technique est utilisée pour des examens localisés. Dans la majorité́ des cas présentés pour un examen IRM, on aura au préalable réalisé un examen approfondi et une anesthésie diagnostique. Toutes ces étapes sont nécessaires à la localisation du problème mais aussi pour cibler précisément la région à examiner.
Quelles régions anatomiques peut-on examiner avec un système IRM « bas champ » ou IRM debout ?
Le pied
Le sabot rend très difficile l’évaluation des tissus mous présents à l’intérieur du pied (le tendon fléchisseur profond
et le ligament impair par exemple). L’IRM permet une évaluation complète des structures du pied : aussi bien des tissus mous mais aussi des structures osseuses avec notamment la mise en évidence de lésions de type œdème médullaire qui signent une inflammation de l’os et ne sont pas visibles ni à la radiographie ni à l’échographie.
Le paturon
Chez les chevaux de races aux fanons fournis et à la peau épaisse, les lésions des structures du paturon (le ligament annulaire, la gaine et les tendons fléchisseurs, les ligaments sésamoïdiens) peuvent être difficiles à déceler par l’échographie. Un examen IRM est particulièrement intéressant pour explorer cette région.
Le boulet
Le boulet agit comme l’un des principaux amortisseurs du membre du cheval. Des changements de densité osseuse constituent une réponse normale à l’exercice mais un remodelage excessif par stress peut favoriser des lésions osseuses. L’examen IRM va permettre une évaluation complète et détaillée des structures tendineuses et ligamentaires montrant l’activité inflammatoire et l’extension de la lésion.
Le ligament suspenseur
Une douleur en région métacarpienne ou métatarsienne proximale est une cause fréquente de boiterie. L’anesthésie locale peut permettre de localiser la région douloureuse, mais c’est grâce à l’IRM que l’on va identifier avec précision la lésion à l’origine de la boiterie et son importance.
Le carpe/tarse
Pour ces régions, l’examen IRM peut permettre d’identifier un plus large éventail d’affections que la radiographie ou l’échographie. On peut diagnostiquer par exemple des anomalies du ligament inter-carpien, des irrégularités des surfaces osseuses ainsi que des modifications de l’os sous chondral.
L’examen IRM, un coût initial élevé mais un bon retour sur investissement
Grâce à l’examen IRM, la cause de la boiterie est identifiée dans plus de 90% des cas avec un diagnostic précis de la pathologie et donc un traitement et un pronostic adaptés. Bien que l’IRM soit une technique d’imagerie coûteuse, ses avantages peuvent en faire un choix stratégique pour éviter des dépenses prolongées au fil du temps, en particulier pour les chevaux souffrant de boiteries chroniques.
En l’absence de réponse au traitement, il est fréquent pour un propriétaire de dépenser une somme conséquente suite à la réalisation répétée d’examens radiographiques et/ou échographiques, la mise en œuvre de traitements multiples (anti-inflammatoires, infiltrations articulaires) et des périodes de mise au repos et rééducation prolongées… Mis bout à bout, tous ces soins et consultations représentent un coût bien souvent supérieur à celui d’un examen IRM. D’autant qu’il arrive régulièrement que les radiographies et les échographies réalisées sur le cheval ne permettent pas de trouver l’origine de la boiterie.
L’examen IRM en évaluant à la fois les structures osseuses et les tissus mous en trois dimensions, est une aide précieuse pour comprendre l’origine de la boiterie et choisir la prise en charge thérapeutique la plus pertinente.
D’autres systèmes d’imagerie (scanner, scintigraphie) seront également utiles pour le vétérinaire qui les prescrira en fonction de la zone à examiner.
De nos jours, la médecine vétérinaire permet de réaliser des examens de pointe sur les chevaux. L’IRM est un progrès énorme dans la prise en charge entre autres des boiteries chez le cheval car il permet de poser un diagnostic précis et sûr.
Javier Muñoz
Docteur vétérinaire, responsable Service Imagerie
Crédits photos @La clinique du Cheval @Shutterstock