Vous souhaitez mettre votre jument à la reproduction pour la première fois et êtes un peu perdu ? Vous vous demandez quels critères objectiver pour bien choisir un étalon qui lui convienne, comment mettre les chances de votre côté pour concevoir un poulain, comment estimer le budget à y allouer ? Voici quelques questions auxquelles il vous faudra répondre au préalable.
Comment choisir un étalon qui corresponde à ma jument ? Comment « raisonner son accouplement » ?
Tous les ans, une multitude d’étalons est proposée sur le marché et il n’est pas toujours facile de s’y retrouver. Savoir choisir « le » bon étalon n’est pas chose aisée, et il n’est pas forcément nécessaire de se précipiter sur telle ou telle « star ». De nombreux facteurs sont à prendre en compte, à mettre en perspective avec les caractéristiques propres de votre jument et l’usage que vous voulez faire de votre futur poulain :
- Regarder son modèle et ses allures et rechercher ce qui optimise ou compense les éventuels « points faibles » de la jument.
- Étudier ses indices génétique et de performance dans la discipline choisie, notamment si le poulain a une vocation sportive, de manière à se faire une idée sur sa qualité génétique et ses aptitudes.
- S’attarder également sur d’autres caractéristiques : tempérament et comportement, taille, couleur de robe, éventuelles maladies génétiques…
Pour en savoir plus : https://www.ifce.fr/ifce/connaissances/webconferences/elevage-et-entretien/raisonner-les-accouplements-a-quoi-faut-il-penser/
Selon l’étalon choisi, il faudra vous assurer de sa localisation au cours de la saison de monte ou de l’éventuelle disponibilité de sa semence sur le territoire. Ceci est conditionné par :
- La réglementation, qui précise les techniques de monte possibles selon la race du poulain à naître :
- Monte en main/insémination artificielle (IA) sur place : il vous faudra alors amener la jument pour une saillie/insémination sur le lieu de stationnement de l’étalon ou l’y laisser en pension. Dans certains cas, la pension peut être assurée par des structures du voisinage qui gèrent également la « saison » de la jument.
- Semence transportée ou congelée, a priori disponible partout.
- Le choix du propriétaire de l’étalon.
- La « qualité » de la semence de ce dernier, qui résiste plus ou moins bien à la conservation et impacte les choix d’exploitation.
Comment gérer la saison de reproduction de ma jument ? Un compromis entre savoir-faire/budget /temps/technique utilisée
Le succès d’une saison de reproduction ne s’improvise pas ! Il est conditionné par sa préparation et sa gestion. Pour cela, il faut avant tout avoir une jument en bon état corporel – ni trop grasse, ni trop maigre – et en bonne santé. Privilégier une mise à la reproduction précoce dans la saison (février/mars si possible, ceci permettant d’exploiter plus de chaleurs si besoin) et, au préalable, bien penser à vérifier son suivi sanitaire (vaccinations, prélèvements obligatoires pour la monte…). Enfin, une bonne gestion de la saison implique un suivi gynécologique rigoureux des chaleurs, en anticipant la réservation et la commande de doses d’insémination, en respectant les dates de diagnostic de gestation et de retour en chaleur si la jument n’a pas été fécondée. Par conséquent, selon votre savoir-faire technique et vos disponibilités, il vous faudra avoir recours aux services de professionnels.
Par exemple :
- Gérerez-vous les rendez-vous pour le suivi gynécologique de votre jument, les allers-retours à la saillie ?
- Votre jument sera-t-elle en pension pendant la saison / comptez-vous tout déléguer ?
Pour en savoir plus : https://www.ifce.fr/ifce/connaissances/webconferences/elevage-et-entretien/mettre-sa-jument-a-la-reproduction-les-bases/
Ce n’est pas du 100%… mettez toutes les chances de votre côté !
- La fertilité par chaleur (F/Q = probabilité d’avoir une gestation sur une chaleur exploitée | si F/Q = 50%, alors une chance sur 2) elle varie selon les étalons et les techniques de 30 à 55%. Plus la semence est manipulée, plus elle est potentiellement subfertile : elle nécessite de l’attention à toutes les étapes et un suivi rigoureux. À réserver aux juments qui n’ont pas de problème de fertilité avéré.
- La fertilité en fin de saison de reproduction (FFS = elle correspond à la probabilité d’avoir une gestation sur une saison exploitée) : elle avoisine les 85% si tout va bien (semence et jument fertile, saison bien gérée…).
- La fertilité apparente (FA = chance d’avoir un poulain sevré l’année d’après) : elle prend en compte les avortements tardifs et la mortalité avant sevrage, et se situe entre 60 et 70%.
De plus, quelques éléments peuvent être pris en compte pour estimer la fertilité intrinsèque d’une jument. Ceci permet aussi d’aller vers les étalons et les techniques réputés comme les plus fertiles si la jument présente un risque de fertilité diminuée.
- Quel âge a-t-elle ? Après 15 ans, on observe une baisse de la fertilité liée au vieillissement physiologique, que la jument ait eu des poulains ou non.
- A-t-elle déjà eu des poulains ? Et si oui, étudier son historique : a-t-elle été fécondée chaque année où elle a été mise à la reproduction ou régulièrement vide ? Essayer d’enquêter sur les causes…
- Était-elle suitée l’an dernier ou est-elle restée vide ?
Comment offrir de bonnes conditions d’élevage à mon futur poulain ?
Vous avez une jument de concours ou de loisir et vous envisagez d’en faire une reproductrice ? Projetez-vous donc dans l’avenir pour vous assurer que vous êtes à même de lui procurer les conditions de vie qui lui conviennent, à elle et au(x) poulain(s) à venir. Pouvez-vous lui assurer :
- Un mode d’hébergement adapté : des surfaces herbagères suffisantes, bien clôturées et offrant des abris pour l’hiver/l’été, une surveillance quotidienne, voire idéalement des conditions de vie en groupe, pour le bien-être de la mère et de son poulain ainsi que pour l’apprentissage social de ce dernier.
- Une alimentation composée en grande partie de fourrages (herbe pâturée et/ou fourrages conservés) avec une augmentation très progressive de la ration, notamment en fin de gestation et au cours de la lactation.
- Un bon suivi sanitaire, à la fois pour la jument et son poulain : vaccinations obligatoires, suivi parasitaire, entretien des pieds…
- Un accompagnement jusqu’au poulinage (incluant la surveillance de cette étape cruciale). Il faudra aussi penser à l’éducation et au sevrage/débourrage du poulain, et potentiellement prévoir de faire appel à des professionnels qualifiés pour vous aider à chaque étape le cas échéant.
Pour en savoir plus : https://equipedia.ifce.fr/sante-et-bien-etre-animal/bien-etre-et-comportement-animal
Comment estimer le budget à y allouer ? Quel sera le coût de revient de mon poulain ?
Pour éviter les mauvaises surprises voire déboires, le coût de revient du poulain est à prendre en compte dès le départ du projet. Voici les postes à détailler pour estimer le budget à prévoir pour cette aventure :
- L’étalon choisi (coût « génétique ») : les prix sont extrêmement variables selon sa notoriété… Souhaitez-vous aller vers un reproducteur confirmé, un jeune étalon prometteur, un étalon disponible près de chez vous ?
- La technique utilisée : monte en main et IA n’impliquent pas les mêmes frais techniques. Le suivi vétérinaire ou les coût inhérents aux matériels/savoir-faire/produits utilisés peuvent avoir un impact majeur.
- Les frais annexes (transport, pension…) qui sont aussi liés au nombre de chaleurs qu’il faudra exploiter pour que votre jument soit gestante.
- Les frais liés à la pension, l’entretien, le suivi sanitaire de la jument gestante/allaitante.
- Le devenir du poulain, qui va conditionner la durée pendant laquelle vous allez l’entretenir :
- Utilisation personnelle ?
- Vente au sevrage ?
- Valorisation pour vente ultérieure (coût/an x nb d’années, en prenant aussi en compte les éventuelles sorties en compétition).
Pour conclure : Étudier de plus près tous ces points techniques vous permettra de faire des choix éclairés, pour profiter au mieux de cette aventure, rêve de nombreux heureux propriétaires d’une jument !
Par Laetitia LE MASNE (ingénieur de développement IFCE)
crédit photo @ B. Lemaire – IFCE